Urbanité

J'ai toujours considéré la ville comme un lieu de passage. alors que, l'appareil aux aguets, je déambule aux milieu des passants qui s'affairent, se pressent, se croisent, s'ignorent, se rassemblent et, occasionnellement se posent ; traquant les reflets de cette intense activité urbaine, je me fonds dans la circulation, cherchant à traduire ce que je vois en images. Et si, découvrant dans une vitrine mon image mêlée à celle des autres, tentant de l'esquiver en faisant un pas de côté, cette image résiste, je l'interroge, surpris: de qui s'agit-il ?
"Dans la rue, les voitures circulent dans le sens contraire, elles lui donnent l'impression qu'il presse le pas, or il ne va plus vite, aperçoit simplement son reflet glisser sur les vitres, sur les devantures, parfois lent, parfois saccadé, découpé, brusque. Cette image, portrait en pied, médaillon, portrait français, anglais ou espagnol, face de crabe, d'oeuf ou de rat, tête à gifle et à claque, s'enfonce, revient, part de biais, se déforme, tête coupée, puis buste, puis en pied de nouveau, puis plus rien, sur les carrosseries des voitures également, mais trop rapide, trop déformée pour être saisie." (Bernard Hoepffner, "Portrait du traducteur en escroc").
Un jeu de cache-cache ? En quelque sorte. Avec la vie urbaine. Entre moi et la ville, entre le réel et son double. Ainsi, d'un autoportrait volé au gré d'un déclenchement semblable à un clin d'oeil, ainsi de la vision éphémère que l'on peut avoir de soi.